(#9) Drone de musiques Greco, 5 mai 202420 juin 2024 – Dans son passionnant ouvrage, Les fous du son, Laurent de Wilde évoque comment Theremin, l’inventeur du fabuleux instrument éponyme, avait imaginé, pendant la 2e guerre mondiale, un système d’espionnage audio dirigeant un rayon infrarouge vers les vitres de locaux sensibles (comme les ambassades). En récupérant la résonance du verre, il pouvait capter, à plusieurs centaines de mètres, des conversations très confidentielles… – C’est fou ce truc… – Oui. Et si on veut transposer cette brillante idée datant de presque 80 ans, on peut imaginer comment des drones très lents (et donc silencieux), pilotés par l’IA, tout en restant à une distance insoupçonnée, pourraient détecter et enregistrer n’importe quel propos. Qu’ils soient subversifs ou non ! – Brrrr ! Où va notre vie privée … – Oui. Mais j’imagine d’autres applications encore plus terribles. – Comme ? – La détection automatique de musiques prohibées. On sait que la Russie de Staline et l’Allemagne d’Hitler avaient interdit une longue liste de compositeurs jugés décadents ou dégénérés. Certes, c’est de l’histoire ancienne, mais, pour se protéger, certains pays en conflit décrètent des lois surprenantes, notamment sur la musique… – Par exemple ? – Une récente loi ukrainienne interdit certaines musiques russes contemporaines sous le prétexte : “Le produit musical de l’agresseur peut agir sur les humeurs séparatistes de la population”*. – Non ! – Et c’est pas fini : les autorités tchétchènes veulent interdire les morceaux de musique aux tempos trop rapides ou trop lents** ! Et on peux ajouter : Toomaj Salehi, le rappeur militant, condamné à mort***. Et les instruments de musique “immoraux” brûlés en Afghanistan****… – Quelle horreur ! – Alors, imagine un pays totalitaire qui utiliserait des drones pour détecter à plusieurs centaines de mètres des musiques ou des chansons censurées et donc clandestines. Imagine une rave party aux musiques illégales et repérées par des drones fouineurs, a priori inoffensifs. Mais capables de repérer instantanément ces musiques interdites, même altérées par un tempo différent ou une interprétation décalée. Et bien entendu, entraînés à la reconnaissance faciale… – Mais l’art et la musique sont des manifestations de la liberté ! C’est inacceptable ! – Oui, nous sommes d’accord. Du coup, une autre idée me vient : et si, un jour, certains gouvernements -radicaux, évidemment- utilisaient les services de l’IA pour générer les Musiques Officielles de l’Etat… Des musiques lissées … – Policées ? *sources (entre autres) :* Radio France Juin 2022 / ** BMF TV avril 2024 / *** TV5 Monde 4 mai 24 / **** FranceInfo juil. 23 (Si seulement ce que j’écris pouvait être totalement fictif…) Retour au sommaire La musique et l'IA