(#6) Spectacle vivace, conserve infectée, budget amputé !

– Ça veut rien dire “spectacle vivace” !

–  Mais si ! Vivace signifie “qui oppose une résistance à une force extérieure”. Et tu sais ce que c’est, la force extérieure ? Le monde des substituts artificiels et intrusifs. Tu vois de quoi je parle ?

– Encore les IA !

–  Oui ! En fait, dès que quelque chose sort de notre cerveau, il y a un risque de “dataïsation”, je veux dire, nos idées son disponibles pour être immédiatement transformées en informations numériques, puis enregistrées et sauvegardées dans une mémoire plus ou moins fugitive, plus ou moins accessible et dont la propriété nous échappe. De la conserve, quoi. 

–  Ok, mais pourquoi “conserve infectée” ?

– Parce que le risque d’infection est omniprésent : les manipulations douteuses, les clones augmentés, le deep fake, l’hyperfragmentation, le musicochimerisme, etc. contribuent de plus en plus à nous faire douter de la réalité. Qui croire ? Et si le monde de la conserve est perverti, celui du spectacle vivant le sera moins ! Car vivace ! Car composé principalement d’humains. Eux seuls transmettront et identifieront la vérité, le naturel et l’évidence.

– Rien que ça !

– Oui. Et quand la quête de vérité sera tellement impérieuse, on ira tous chercher la relation de proximité avec les artistes, les instruments acoustiques, la voix, le chant, la poésie, la nature… 

– C’est vrai que ma fille préfère que je lui raconte une histoire plutôt que de l’écouter au casque connecté…

– Voilà. Pas la peine de revenir à l’époque des chandelles pour comprendre que la transmission orale et corporelle sont des facteurs d’authenticité. 

–  C’est marrant ce que tu dis car je viens de lire que le budget du ministère de la culture a été réduit de 10% en essorant le patrimoine et le spectacle vivant : amputé de 96 millions d’euros* !

– Je sais : c’est insensé ! Pourtant, s’il y a bien un secteur qui mérite une attention toute particulière en période de crise et de menaces, c’est la culture. Transmettre l’imaginaire, transmettre les émotions, faire rêver les gens autrement qu’en les manipulant avec des produits transformés contribue à l’équilibre de notre société. La créativité est une stimulation indispensable pour aller mieux. Si elle se flétrit, c’est le déclin annoncé…

*Décret du 21 février 2024